La cérémonie de Chabrol, sujet d'exposé

[Arumbaya]

Bonsoir à tous.

Je me permets d'ouvrir un topic d'appel au secours. En fait, je dois faire un exposé et je n'ai absolument aucune idée de comment répondre à la problématique qu'on m'a donné. Comme vous vous en doutez, ça concerne le film de Chabrol "La cérémonie".

Voici la question : "Comment La Cérémonie de Chabrol est-elle représentative de son style et de son utilisation particulière de la mise en scène".

Vous froncez les sourcils ? Oui, j'ai fais pareil. :shock:

En gros, je m'adresse à vous cinéphiles, qu'est-ce qui fait que quand vous regardez "la cérémonie" fait que vous vous dites "Ah, ça, c'est bien du Chabrol".

J'ai bien essayé de regarder d'autres de ses films (Le beau Serge, A double Tour) mais comme je suis novice en terme de cinéma, rien ne me saute aux yeux. Je ressens bien le fait que Chabrol était très caustique, que tous les sujets qu'il abordait étaient traités avec un "humour" assez particulier, mais je ne vois rien d'autre.

Si vous avez lu jusqu'au bout, merci. Si en plus vous pouvez m'aider, je vous paye le champ'. Si vous m'avez lue mais que vous ne pouvez rien pour moi, merci quand même. :mdr:

[Kelam]

Bon, je suis pas expert non plus, mais ce que je retiens des films de Chabrol, c'est l'ambiance très froide qu'il peut y avoir.

Tous ses films se déroulent dans le milieu de la petite bourgeoisie, où ils essaient de se donner des airs mais sans y croire, d'où l'ambiance.

Je crois aussi que le film est souvent du point de vue de quelqu'un d'extérieur à ce milieu, comme un flic (Poulet au vinaigre, avec un Poiret au top) ou, dans la Cérémonie, une pauvre âme. C'est ce qui explique le regard très critique sur ce milieu.

Et effectivement, l'humour à froid caractéristique n'arrange rien.

Voilà, si quelqu'un peut enchaîner, ça m'arrangerait... ^^

[cosette]

Je ne me souviens plus exactement de tout le déroulement du film. Mais voici les pistes que je te conseille d'analyser :

Le thème du film est notamment la lutte des classes. Chabrol est un expert dans l'art de caractériser ses personnages, il a un sens du détail qui transparaît dans chaque plan, parce que cette lutte est avant tout fondée sur l'apparence. Regarde attentivement :
- la façon de parler des héroïnes qui tout de suite dit leur appartenance à une classe sociale basse
- leurs vêtements et notamment ceux de Sandrine Bonnaire qui est très mal fagottée
- leurs manières vulgaires
A l'inverse, les bourgeois, les notables de province habitent une belle maison et s'habillent de façon chic.
La scène où une des héroïnes déchire les vêtements de sa patronne est donc pleine de sens.

Cette lutte entre deux milieux est au coeur du film. Le film nous raconte la trajectoire de deux femmes marginales qui vont tenter de s'inflltrer dans ce milieu qu'elles côtoient sans en faire partie. Peu à peu elles s'immiscent dans leur vie (la postière lit les lettres) pour au final aller jusqu'à commettre un massacre, comme si elles avaient enfin trouvé le moyen d'asservir ceux qui les dominaient jusque là.
Cette trajectoire meurtrière brouille les frontières entre le bien et le mal, comme toujours chez Chabrol. On voit le personnage de Sandrine Bonnaire se faire peu à peu contaminer, la faible épouse les idées de la forte, l'espèce de timide attardée devient une meurtrière sanguinaire.

Un autre élément symbolise cette opposition de classes : la télévision. Le personnage de Sandrine Bonnaire est analphabète, elle n'a pas accès à la connaissance, à la culture, contrairement aux "notables". Dans une passivité totale elle se contente de regarder la télévision, qui ici remplit une vraie fonction et devient presque un personnage à part entière.
Comme le choeur dans la tragédie antique, la télévision semble à plusieurs reprises annoncer ce qui va se passer, diffusant des paroles qui s'avèrent pleines de sens (il faudrait regarder le film pour voir exactement ce qui est dit). Dès lors, on peut essayer de faire un éventuel parallélisme de construction entre le film et les codes de la tragédie... La tragédie classique met en scène des héros de haut rang qui sont soumis à la fatalité qu'exercent sur eux les Dieux. Les héroïnes peuvent ici apparaître comme des Furies, des Erynies de la mythologie grecque, déesses vengeresses qui tuent ceux qui ont commis des affronts (ici, les bourgeois)...
En regardant le film, essaie de voir s'il peut se découper en actes, comme ceux de la tragédie classique :
- acte 1 : exposition des personnages
- acte 2 : apparition de l'élément perturbateur
- acte 3 : les personnages cherchent une issue au drame
- acte 4 : le drame est définitivement noué, la fin s'annonce inexorable
- acte 5 : mort des personnages

[Kelam]

@ cosette : Mais comment tu fais pour avoir une capacité d'analyse aussi fine, aussi juste et pertinente ? :shock:

[Arumbaya]

S'il y avait un smiley qui se prosterne, je le mettrais.

Un grand merci à tous les deux, vous me rassurez car c'est plus ou moins ce que j'avais ressenti. Ca m'a un peu donné le déclic, reste plus qu'à mettre tout ça en forme. Ca va pas être du gâteau mais j'aperçois de la lumière au bout du tunnel.

MERCI.