John Sotos est chargé de superviser le jargon médical sur House et de le garder cohérent. Wired.com a pu interviewer John Sotos et lui poser des questions sur son rôle dans la série. Nous vous proposons une traduction complète de ses propos.

Interview de John Sotos, le consultant médical de House - House-fr.com

Derrière chaque émission de télévision intelligente, il y a un coordinateur de scripts, un conseiller technique, un chercheur ou un producteur infatigable qui s’assure que le jargon est juste, la science exacte et les références culturelles au point. Pour avoir une meilleure idée sur qui maîtrise les Geeks en colère, Wired.com s’est entretenu avec ses chercheurs qui opèrent derrière les saisons TV.

John Sotos pourrait être un expert en diagnostics obscurs, mais cela ne signifie pas qu’il ait quelque chose en commun avec le personnage principal de House. Il doit juste s’assurer que toutes les choses acerbes que dit le médecin brillant, mais socialement inepte, soient vrai, du point de vue scientifique.

« C’est un série sombre et j’essaie de ne pas vivre ma vie comme ça, » déclare la voix douce de Sotos dans une interview accordée à Wired.com. « Il y a donc beaucoup de facettes du personnage qui ne me parlent pas. »

Sotos, qui a été formé comme cardiologue à « Johns Hopkins University School of Medicine », est pourtant l’homme parfait pour s’assurer de l’exactitude de House. Il a même écrit un livre sur le genre de diagnostics inattendus que fait le médecin à la canne lors de presque chaque épisode. (Le livre s’intitule Zebra Cards : Une aide aux diagnostics obscurs)

Cela ne veut pas dire qu’il n’a pas à faire des recherches pour la série, qui diffuse sa huitième saison sur la Fox. Le bon docteur consulte des revues médicales et des livres pour trouver les informations nécessaires pour étoffer les histoires médicales de la série, bien qu’il s’estime heureux de travailler avec des scénaristes qui ne lui donne pas trop de maux de tête.

« Ils comprennent très rapidement », dit Sotos. « Certaines choses que j’aurais dû expliquer aux étudiants en médecine deux ou trois fois, les scénaristes, eux, les comprennent très rapidement. »

TV Fact-Checker : John Sotos

Titre : Médecin Conseiller technique, House (Lundi 21h sur la Fox)

Bona fides : Formé comme cardiologue à l’Université Johns Hopkins School of Medicine. Alors qu’il était étudiant en médecine, il a développé un intérêt pour les symptômes inhabituels et a écrit le livre Zebra Cards.

Comment vous vous êtes retrouvé sur House ?

Une de mes amies m’a appelé et m’a dit: « Hey, il y a une série et le médecin me fait penser à toi. » Je ne pense pas qu’elle disait ça parce qu’elle pensait que j’étais un connard, mais plutôt à cause des sujets techniques présentés. Alors j’ai regardé quelques épisodes et j’ai pensé: « Bon dieu, c’est moi. » Alors j’ai envoyé à l’équipe de House une copie de mon livre, et quelques mois plus tard, ils m’ont invité à venir.

Quel genre de choses ont vous demande de vérifier ? Quelle est votre démarche ?

Je reçois tous les brouillons de chaque script et je corrige les faits médicaux et – j’aime à le penser – j’ai une sorte de responsabilité vis a vis des gens. Certains des scénaristes m’appellent dès le début de l’élaboration d’un script et me disent : « Hey, j’ai une idée de personnage et j’ai besoin d’une maladie pour aller avec. »

Pouvez-vous nous donner un exemple ?

L’un des scénaristes m’appelle et dit : « Je voudrais écrire une histoire sur une star du porno ». Et quand vous dites « star du porno » à un médecin, certaines maladies viennent à l’esprit et, bien sûr, nous ne voulons pas suivre les maladies habituelles auxquelles tous le monde pense. Et c’est ce que nous faisons. Nous avons pensé à un ensemble de conditions qui peut entrainer des problèmes médicaux, si on vit une vie trop saine. Nous avons donc décidé d’affliger à cette star une de ces maladies. Une autre fois, un scénariste m’a appelé et m’a dit : « Je voudrais que ce patient ait un symptôme assez courant. » Alors, j’ai pensé : « Eh bien les reniflements sont assez communs et la maladie de Hansen (la lèpre) peut causer des reniflements. Mais tous ceux qui reniflent n’ont pas la maladie de Hansen. »

Nous avons fini par ne pas utiliser la partie avec les reniflements, mais nous avons utilisé une partie de la maladie de Hansen. Le scénariste a décidé d’utiliser le fourmillement, la sensation que des insectes rampent sur la peau. »

Avez-vous déjà conseillé Hugh Laurie sur une manière de parler ou autre chose ?

Tous les mots des personnages sont très soigneusement écrits dans les scripts. J’ai donc le sentiment qu’il y a peu ou pas d’improvisation. Parfois il y a des questions sur la prononciation de certains des termes médicaux, mais il y a un guide de prononciation avec chaque épisode. Nous avons une infirmière à plein temps, sur le plateau, et elle répond à un grand nombre de ces questions.

Quelles sortes de changement avez vous apporté aux scripts ?

La plupart des changements concernent le vocabulaire. Par exemple, ils vont utiliser une phrase comme « douleurs à la poitrine. » Eh bien, de bons médecins ne parlent pas de « douleur thoracique », car la sensation d’angine de poitrine n’est pas vraiment la douleur, c’est la pression ou l’inconfort. Je vais donc juste changer ce mot. Certaines choses sont plus importantes. Une chose que nous avons assez fréquemment dans la série ce sont les diagnostics différentiels, où le patient présente un ensemble de symptômes et l’équipe donne différentes possibilités. Parfois, je vais obtenir un script et les différents diagnostics possibles, qui sont écrit, ne correspondent pas vraiment, donc je peaufine ça.

Qu’en est-il pour les histoires ou les problèmes médicaux qui durent tout l’épisode?

Parfois, un scénariste va dire : « J’ai besoin d’aller du point A au point B. J’ai un patient avec cet ensemble de symptômes et à la fin je veux qu’il ait besoin d’une IRM cérébrale.  » Ainsi donc, vous avez à construire une hypothèse plausible qui vous mène vers le cerveau. Cela peut être assez difficile.

Oui, comment faîtes-vous cela ? Comment passez vous, disons, d’un doigt qui tremble à une IRM?

Il y a différentes façons de lier deux choses ensemble. Si quelqu’un a un doigt qui tremble et que vous voulez aller à son cerveau, vous pourriez dire qu’il a eu une attaque dans une certaine partie qui pourraient être liée à une tumeur. C’est une relation bien connue, cependant. Si cette relation n’existe pas alors ce que je fais généralement c’est me rabattre sur Mechanistic Connects — The Physiology of the Human Body.

Il y avait un épisode de la saison 3 ou 4 où nous devions aller du cerveau vers le cœur. Le scénariste et moi avons eu beaucoup de mal. Finalement, j’ai trouvé un article qui disait que l’activation asymétrique de la moitié du cerveau peut avoir un effet sur le cœur. C’était quelque chose que je ne savais pas. Très peu de médecins le savent.

Parlez-moi des « poumons dans une boîte » dans l’épisode Transplant.

Nous avons un médecin à plein temps sur l’équipe de scénaristes, et il a écrit cet épisode. Donc je n’ai vraiment pas eu à passer autant de temps que je le fais habituellement. La plupart de mes corrections étaient assez mineures. J’ai suggéré une blague qu’ils n’ont pas utilisée. Mais ils ont parlé un peu de l’anatomie du poumon. Le poumon est divisé en plusieurs lobes. J’ai juste eu à peaufiner la façon dont ils parlaient des lobes. C’était une correction anatomique mineure. C’est un épisode atypique.

Quelle est la plus grosse erreur que vous ayez relevée dans un script ?

Lorsque le premier jet d’un script sort, il y a 8 à 10 jours jusqu’à ce que l’on commence a tourner. Si vous voyez un gros problème, vous ne pouvez vraiment pas changer le moteur (ndlr: le script) avec seulement huit jours restant. Je me souviens d’un script dans lequel j’ai eu à faire avec une fille de 5 ou 6 ans qui avait été exposée à de la crème de testostérone et qui, par conséquent, avait commencé à avoir ses règles. C’était un problème que je ne pouvais pas réparer. La menstruation est causée par les hormones féminines, plusieurs hormones qui montent et descendent d’une manière chorégraphiée. Je ne voyais pas comment il était possible d’obtenir une hormone mâle qui adopte cette physiologie. Je ne pouvais pas le régler en une phrase ou deux. Il n’y avait aucun moyen de le substituer a autre chose. Donc j’ai simplement pris mon courage a deux mains et dit : « Nous allons devoir accepter les critiques sur ce point la. »

Trois ans plus tard, je lisais un article dans un journal sur la puberté précoce et j’apprenais que l’exposition à la testostérone peut déclencher la puberté centrale. En d’autres termes, l’hormone active une partie centrale dans le cerveau qui déclenche la puberté normale à un âge précoce, alors ça pourrait être une explication pour ce que ce scénariste avait rédiger. Je l’ai appelé et je lui ai demandé : « Le saviez-vous ? » Mais je ne vous dirais pas ce qu’elle a répondu.

Avez-vous eu une erreur qui a été diffusée et que vous auriez souhaité avoir repéré ?

C’est habituellement des choses mineures. Je suis allé à Hopkins et nous vénérions un médecin nommé Osler. Et la prononciation de son nom est mal sortie. J’ai eu un pincement au cœur quand j’ai entendu cela. C’était comme si j’avais laissé tomber les gens, à Baltimore.

Vous pouvez consulter l’interview sur le site de Wired.com.